Enrico Macias

« …POUR QUE MES ENFANTS NE ME REPROCHENT PAS DE N’AVOIR RIEN FAIT »

A l’occasion de la sortie de son nouvel album, “La vie populaire”, Enrico Macias a bien voulu revenir sur son passé. Les malheurs ne l’ont pas épargné. Il en tire quelques leçons.

Pour Temps Libre, le chanteur du soleil revient sur les évènements marquants de sa vie.

Après 45 ans de carrière, quel regard portez-vous sur votre parcours ?

Non seulement, je suis content mais je ne regrette rien. Ni les bons, ni les mauvais moments. Ce sont les échecs qui font la réussite. Et au final, c’est la longévité, le vainqueur de tout.

Appréhendez-vous de vieillir ?

Lorsque je pense à mon frère, mort à 23 ans dans un accident de voiture, si je me plains de vieillir, c’est une insulte à sa mémoire. Non, je suis un épicurien, j’adore manger mais j’ai tendance à grossir alors je fais attention. Je fais du sport. Je pense qu’il faut respecter son corps autant que son esprit. L’un ne marche pas sans l’autre.

Votre père était violoniste. Vous avez choisi la guitare, pourquoi ?

Quand j’étais petit je traînais le violon de papa par terre mais je n’ai jamais pensé à en jouer (rires). Peut-être parce qu’il m’impressionnait trop. A la maison il y avait une mandoline, c’est comme ça que j’ai commencé à jouer de la guitare. J’ai appris tout seul. Je suis un autodidacte. Ma première guitare, c’est ma grand-mère qui me l’a offerte. A mes débuts je jouait avec les gitans. Pour pouvoir jouer dans les bars, comme j’étais mineur, je me faisais passer pour leur petit frère. Ils me surnommaient “Le petit Enrico”. J’ai adoré jouer avec eux car il n’y avait pas la même rigueur qu’avec Tonton Raymond (Ndlr. Raymond Leyris) pour la musique arabo-andalouse classique. Jouer avec eux était une vraie récréation. Il n’y avait ni barrière ni frontière.

Que vous évoque l’Algérie ?

Ma terre natale. Constantine, l’endroit où je suis né. C’est important, non ? Je suis resté en Algérie jusqu’à 22 ans. Entre-temps, j’ai passé mes examens en France parce que c’était la guerre là-bas. Quand je suis retourné à Constantine, j’y suis devenu instituteur. En 1962, on est venu s’installer en France. Mais l’Algérie me manque.

En 2000, vous deviez y retourner pour donner un récital. Que s’est-il passé ?

A l’époque, la raison était soi-disant liée à des problèmes de sécurité. Mais ça a été une reculade de la part des responsables Algériens. En annulant ce voyage, sans motif, ils ont raté une chance historique de réconcilier tous les enfants d’Algérie. Et puis, c’est une insulte à ma personne, à ce que je représente et surtout au peuple algérien. Je promets qu’un jour j’y retournerai, dès que la situation s’y prêtera.

En attendant, vous continuez à chanter la paix.Vous avez bon espoir qu’elle triomphe un jour ?

Si on est tous en vie, c’est que la guerre et la violence ne gagnent pas. Je suis conscient que ça ne va pas très bien dans le monde. Mais les leçons du passé nous aideront dans l’avenir. Je ne travaille pas pour moi. Ce que je fais, c’est pour être en règle avec le jugement de mes enfants et de mes petits-enfants. Pour qu’ils ne me reprochent pas de n’avoir rien fait. Je fais ça pour servir leur avenir. Je veux aussi qu’ils prennent exemple pour leurs propres enfants et leurs petits-enfants.

Votre nouvel album “La vie populaire”a été produit par votre fils. Vous en êtes fier ?

Couverture du nouvel album "la vie populaire" d'Enrico Macias

Oui, mais moins parce que c’est mon fils que parce que c’est un garçon talentueux. Il m’aide beaucoup à avancer dans mon métier. Même si, ce n’est pas toujours simple de marier travail et famille (rires).

Quel est l’esprit de cet album ?

Au départ ce devait être une sorte de voyage à travers le monde. De Tokyo, à Rio en passant par Paris… Mais au fur et à mesure, on a remarqué que ça limitait notre champ d’action. Je n’aime pas les concepts. Chaque chanson a sa propre histoire. Au final, en les collant les unes à côté des autres, c’est »la vie populaire » qui s’imposait. Dans une des chansons, vous dites “La mémoire t’empoisonne”. A quoi faites-vous allusion ? La mémoire, c’est un peu comme le refrain d’une chanson qu’on ne pourrait pas s’enlever de la tête. Elle se répète et son océan de souvenirs nous empoisonne un peu parfois. Ma vie est faite de bons et de mauvais souvenirs. Les mauvais, c’est la perte de mon frère, de mon beau-père et de mes parents. La maladie de ma femme. Et puis les bons, c’est ma carrière, ma réussite dans le monde entier : chanter au Madison Square Garden, au Carnegie Hall, à Tokyo, en Russie, en Israel, être ambassadeur à l’ONU, tout ceux-là sont des souvenirs magiques.

Rassurez-nous, vous n’allez pas arrêter ?

Non (Rires). Je serai à l’Olympia en octobre prochain. C’est bien simple, je n’ai jamais fait une rentrée parisienne sans m’y produire. Mon meilleur reste le premier. Ca tombait juste avec « Paris, tu m’as pris dans tes bras ». C’est un souvenir magique.

La chanson “La vie Populaire”, est-elle inspirée par Paris ?

Oui, bien sûr, mais ce pourrait être ailleurs. J’adore le 9ème arrondissement. J’aime aller à la Boule Rouge, retrouver les pains. “Manger la cuisine Méditérrannéenne, voir les matchs de foot et tchatcher”, comme dans la chanson.

Vous aimez le foot. Un pronostic pour la coupe du monde ?

C’est évident que le Brésil est archi-favori de la compétition. Mais le foot, n’est pas une science exacte.

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